I. L'histoire de ses parents, c'est l'histoire d'amour dont tout le monde rêve. Deux amoureux de la vie qui se font rencontrer lors d'un voyage scolaire. Deux correspondants qui comparait leurs vies, deux vies qui ne ressemblaient en rien, quand l'un était en été, l'autre était en hiver et pourtant ils étaient sur la même longueur d'onde. Tellement que Monsieur avait fait le choix de traverser le monde pour la joindre, il était à peine majeur mais il n'avait pas vraiment réfléchi. Ils s'aiment, ils se marient et tout naturellement, ils fondent leur propre famille. C'est dans ce cadre de la belle Arya avait vu le jour. Dans un berceau d'amour que tout le monde pensait unis, tout le monde avait tort ..

II. Trois ans, c'était le temps de leur bonheur à trois. Trois ans avant que la petite ne tombe malade. Un simple rhume, c'était ce que c'était dit ses parents, un peu de fièvre, des vomissements, pourtant la douleur semblait persister alors au bout de quelques jours, ils avaient décidé de l'emmener à l'hôpital. Et le verdict était tombé. Ses pleurs incessants, ce n'était pas de fièvre, ses maux de tête n'étaient pas exagéré par son jeune âge. Un test, puis deux, puis on recommence, en quelques heures les médecins étaient unanime : Arya était sourde. Toute leur vie allait changer suite à cela. Disputes, accusation, culpabilité, sans trop que l'on sache pourquoi, la petite s'était levée un matin sans maman, puis un second, puis tous ceux qui ont suivi. Personne ne sait où elle est, ce qu'elle fait. Elle a juste refusé de se battre, refuser d'abandonner.

III. Grandir avec une différence, c'est difficile. Grandir sans mère aussi. Et à seulement trois ans, la petite fille allait devoir se préparer à faire les deux. Mais elle n'était pas seule, même si maman avait pris ses cliques et ses clacs, elle avait un papa plus que motivé même si les finances ne lui permettaient pas d'en faire autant qu'il aurait voulu. Ensemble, ils prenaient des cours pour apprendre le langage des signes, c'était l'un des clients de son père qui leur apprenait. Petit à petit, il avait fait les travaux pour adapter leur appartement à la demoiselle, pour adapter leur vie. Mais malgré ses efforts, il n'avait jamais eu les moyens de lui offrir une école spécialisée, elle était forcée d'aller dans une école pour entendant. Et même si ses professeurs étaient compréhensifs et patient avec elle, les années étaient difficiles pour Arya. Les autres enfants étaient durs parfois. Mais elle est consciente que sans ce passage, elle aurait été dans une bulle. Incapable de lire sur les lèvres et sans l'usage de sa langue, elle aurait fait partie de ses sourds qui ont peur de parler, peur qu'on se moque d'eux. Bien sûr, il lui arrive de buter sur des mots ou de mal comprendre ce qu'on veut lui dire, mais elle réussit à communiquer avec eux et c'est déjà beaucoup.

IV. La musique est arrivée dans sa vie un peu par hasard, elle passait souvent ses soirées à réviser ses cours au bar de son père où il y avait un piano en libre service pour les musiciens amateurs qui souhaitent faire profiter leur talent au reste du lieu. Un soir, un homme s'était installé derrière le piano, elle ne l'avait pas vu mais "entendu". Quand il avait commencé à jouer, elle avait ressenti quelques choses, des vibrations qui lui procuraient des émotions fortes et qui l'intriguait. Alors le lendemain, elle avait voulu tester, elle s'était installée derrière le piano, elle avait appuyé avec attention sur chaque note avant d'essayer de jouer, c'était une catastrophe mais après plusieurs essaies, elle avait réussi. Levant la tête vers son père, elle pensait se faire discuter pour son vacarme -comme souvent- mais pour la première fois, elle avait vu une larme sur sa joue. Elle avait treize ans et depuis ce fameux jour, le piano fait partie de sa vie. C'est son échappatoire que personne ne comprend parce qu'une sourde qui joue de la musique, c'est osé, c'est illogique.

V. Arya, c'est la femme qui a toujours refusé d'être vu comme la sourde, comme l'handicapé, c'est le genre de réflexion qui l'a fait démarrer au quart de tours même si au fond, elle sait que c'est vrai. Elle sait qu'elle est différente, elle a juste choisi de faire de sa faiblesse une force. Parce que oui, sous ses airs fragiles, c'est une lionne. Elle donne difficilement sa confiance mais quand elle le fait c'est à vie, quand on l'a perd, c'est pareil. C'est avec beaucoup de difficultés qu'elle a fini le lycée et avec tout autant de difficultés qu'elle avait obtenu son poste pour devenir traductrice puisqu'elle traduit des langues qu'elle ne parle pas. Mais elle sait s'accrocher, elle sait qu'elle devrait toujours se battre même pour des choses anodines.