Hier, on l'a choisie parmi une multitude de filles innocentes. Où sont-elles désormais? Quel calvaire vivent-elles? Hier, elle s'est retrouvée à genoux devant le patron. On l'a escortée à sa chambre où elle a été obligée de se dévêtir pour la première fois devant quelqu'un. Une douche, puis dodo. La nuit a été reposante malgré les craintes.

Au lendemain, tout était si différent, si compliqué, si passionné.

Delphine a complètement disparu. Tree l'a remplacée. Tree est devenue la possession de Lorenzo. En quelques heures, elle s'est métamorphosée en quelqu'un d'autre, en quelque chose d'autre. La petite fille s'est transformée en femme lorsque l'homme est entré dans la pièce ce matin. D'abord, la peur, lorsque la robe a rejoint le sol. Petites bretelles et fin tissu. Elle a goûté à divers sévices, dont ses lèvres et son atout masculin. On l'a touchée intimement à des endroits sensibles et inexplorés. De manière parfois désagréable, parfois intrigante. Elle s'est retrouvée allongée, à genoux, au-dessus, sans comprendre tout ce qui se déroulait réellement. Elle a perdu l'esprit, s'est laissée guidée, a succombé jusqu'à réclamer le soutien de l'homme. C'est lors de cette deuxième journée que Tree a perdu sa virginité. Curieusement, l'homme s'est montré patient et méticuleux. La douleur était justifiée, mais il a su l'effacée à sa façon. Un besoin qu'il reste. Un besoin qu'il parte.

Les rares victoires auxquelles elle s'accroche encore, désormais, sont le respect par lequel on l'a possédée et l'accord alloué aux demandes qu'elle serait autorisée à faire quotidiennement.

Présentement, son corps est soumis aux courbatures. Le patron était dans cette chambre. Suite à son départ, suite à la douche, suite au repas finalement mangé, elle s'est effondrée dans le lit sans réellement voir la journée passer. L'épuisement, la douleur, l'émotion, ont eu raison de sa capacité à rester éveillée. Le réveil n'est pas spécialement agréable. Elle est sensible, incapable de comprendre les petits élancements ici et là. Une trousse de maquillage a été posée sur un bureau pendant son sommeil. Les paroles de l'homme lui reviennent en mémoire : « Mets du mascara. » Il a aussi demandé à ce qu'elle enfile une robe. Elle choisit de mettre la blanche, peut-être parce que ça lui rappelle sa pureté envolée. L'ange a quitté son nuage. Elle ne peut réprimer des grimaces lorsqu'elle fouille dans la trousse. Des ombres à paupière bien trop foncées. Des rouges à lèvre bien trop éclatants. Elle aurait préféré avoir quelque chose pour soigner ses cheveux ; ceux que Lorenzo apprécie tant agripper durement. Elle met donc ce fameux mascara à l'aveugle - l'absence de miroir n'aide pas, mais heureusement c'est une habilité dont elle n'est pas dépourvue. Elle ne peut pas s'empêcher de se tortiller à cause de la culotte ; elle n'est pas trop habituée d'en porter des semblables.

À 19 h, elle doit manger avec le patron. La montre de celui-ci est déposée sur le bureau. La pièce est à ce point silencieuse qu'elle entend nettement l'aiguille tinter dans son habitacle. Plus le temps avance, plus l'anxiété monte. Elle craint de le revoir après... après cette matinée si mouvementée. Mais elle est impatiente de pouvoir sortir. Elle a honte d'avoir hâte ; ici depuis deux jours, l'esprit déjà confus. Les distractions sont inexistantes, dans cette pièce, l'obligeant ainsi à attendre sagement, assise au pied du lit, triturant le pan de sa robe blanche.

Puis enfin, la porte s'ouvre. Plutôt que de faire semblant de dormir, comme ce matin, elle se redresse plutôt vivement, plus réactive que jamais. La porte est ouverte. L'air du couloir pourrait quasiment l'extasier. Est-ce que la robe choisie est aussi bien que celle qu'il avait vue ce matin? Se poser la question est complètement stupide. Mais au moins, elle est prête à l'heure. Elle vient prendre la montre entre ses doigts, puis s'avance comme si c'était un ordre non officiel. Elle tend cette dernière à son propriétaire.

Elle est plutôt surprise que la montre se retrouve à son poignet, sans plus de cérémonie, mais elle sait dore et déjà qu'elle en prendra grand soin. Savoir l'heure, savoir la journée, ça va tellement lui enlever un poids des épaules. La montre est tellement lourde et massive à son poignet. C'est impressionnant comme une petite attention, dans ce milieu, peut vite devenir la plus belle chose au monde. Un cadeau. Un compliment. Une sortie. L'homme en donne beaucoup trop d'un coup et son coeur s'emballe. Soit il parvient à la charmer malgré les horreurs qui l'entourent, soit elle panique à l'idée qu'il cherche à obtenir quelque chose d'horrible en échange. Dans les deux cas, sortir lui apporte un énorme réconfort. Elle prend la rose entre ses doigts, peut-être trop timide pour oser la sentir. Enfin, l'homme s'informe.

- J'ai mangé et j'ai dormi, répond-elle en prenant place à cette table où on l'invite.

Elle dépose la rose sur la table, puis ne peut s'empêcher d'essayer de suivre l'homme des yeux alors qu'il est tout près d'elle. Par réflexe, elle tire le pan de la robe pour cacher ses cuisses. En réalité, elle n'a pas grand-chose à camoufler que l'homme ne connaissance déjà en partie. Seulement, elle est dans un autre lieu, un autre état, et préfère nettement se préserver que trop en dévoiler, même si elle est doit normalement " lui appartenir ".

- En fait, j'étais vraiment épuisée, je n'ai pas vu la journée défiler.

Lui n'a certainement pas eu besoin de repos, profitant d'une journée tout à fait normal. Elle se sent obligée de préciser, comme si elle devait retarder le moment où il poserait les yeux sur elle autrement. Parce que désormais, elle est tout entière à lui, plus qu'elle ne l'a jamais été avec sa propre copine. C'est comme si cette vie était d'une autre dimension et qu'elle n'était plus autorisée à penser à sa copine. Ce qu'elle cherche à faire pour ne pas culpabiliser d'être docile pour sa propre survie. Une survie qui n'est pas si pénible que ça au final. La fille aurait même eu envie d'attraper la main de l'homme au passage, juste pour vérifier que le contact d'aujourd'hui a bel et bien été réel, mais elle préfère se retenir. Pour sa propre santé mentale, elle doit prendre quelques distances. Ce qui est arrivé ce matin l'a simplement prise de court, l'a complètement déboussolée parce que c'était nouveau. Elle doit surmonter ça.

- Vous avez des attentes particulières?

La question résonne curieusement à ses oreilles, comme si elle parlait de choses plus intimes que normales. En réalité, elle veut surtout savoir comment elle doit se comporter lorsqu'il l'invite pour manger. Elle aurait sûrement peur de faire une erreur. Une petite voix dans sa tête ne cesse de lui dire qu'il va devenir de plus en plus exigeant. Elle secoue donc bêtement la tête pour préciser :

- Je veux dire, ce soir, pour le repas.

Son regard ne démord pas de son visage lorsqu'il mentionne ce qu'ils ont vécu ce matin, car il ajoute également vouloir y regoûter. Elle aimerait détourner les yeux, aimerait penser à autres choses, mais les images et les sensations surgissent dans son esprit, comme appelés à s'exprimer. Durant quelques secondes, elle régule sa respiration pour ne pas se laisser emporter. Elle doit cligner des yeux pour éviter de fixer trop longtemps. S’imaginer assise sur lui, à remuer doucement les hanches, crée un noeud à sa gorge. Un peu comme si, avec sa voix, il parvenait à semer une graine dans cet esprit fragile pour y laisser pousser ce qu'il souhaite.

- J’aime bien les desserts. J’adore les déjeuners.

Une tentative pour rester naturelle et consciente de ses paroles sans trop s’y attarder. Elle n’est pas naïve au point de ne pas comprendre les sous-entendus, alors elle préfère répondre honnêtement à ce sujet. Il veut apprendre à la connaître, voilà un début. Elle raffole également des crêpes le matin, du sirop d’érable qu’on y coule dessus. Elle était sujette à la gourmandise, mais c’était délicieux.

- Un jus, merci, je n’ai jamais bu d’alcool.

Elle aurait été tentée de répondre de l’eau, mais ça, elle n’en manque pas dans la chambre. Et curieusement, son corps réclame du sucre. Un jus lui fera un grand bien. Et elle préfère nettement le demander que de laisser filer cette chance s’il change soudainement d’avis. Elle se souvient d’ailleurs avoir mangé ce matin, mais pas d’avoir bu. Voilà une chose qu’elle va devoir travailler. Boire et manger quotidiennement. Le jour où elle sera privée de quelque chose, il ne faut pas qu’elle soit en manque. Mais son corps réagit contre sa volonté, parfois terrorisé, parfois calme. C'est plus compliquer de savoir quand manger et quand boire. Son esprit est tellement accaparé par l'attitude de l'homme et ce qu'elle ressent, que le reste devient quasi secondaire.

Elle garde ses mains sur ses cuisses, ne peut s’empêcher de toucher la montre de son pouce. Aujourd’hui, elle se contentait de la regarder pour voir avancer les aiguilles, pensant au pire si elle devait la briser. Là, elle touche parce qu’elle apprécie beaucoup cette montre qui sera l’un de ses principaux piliers pour affronter les journées.

- Qu'est-ce que vous voulez savoir exactement?

Contrairement à la première fois où il a mentionné vouloir la connaître, elle se montre un peu plus ouverte. La dernière fois, elle était complètement fermée, se contentant de dire qu'elle était " masseuse ". Elle est déjà coincée, alors ça ne coûte rien d'essayer d'être un peu moins braquée pour être un peu moins secouée. Et savoir qu'ils vont manger lui donne terriblement faim soudainement.

- Pour commencer, je déteste le jus de fruits.

Elle tend le bras, attrape le verre, le guide à ses lèvres. Mais derrière ce geste, ce cache un petit sourire à peine visible. Elle boit et c'est très bon. Elle essaie d'être sarcastique pour détendre ses propres ardeurs. Elle est nerveuse et gênée. Plaisanter lui semble être un moyen d'être confortable dans cette pièce - toujours sans fenêtre. Elle va devoir apprendre à côtoyer l'homme et apprécier les moments aussi calmes que celui-ci. Elle boit même une seconde gorgée. Le froid est agréable à sa gorge. Étonnement, elle cale le contenu du verre. Finalement, elle était bien assoiffée. Elle essuie le coin droit sa lèvre de son pouce. Son regard se porte sur la bouteille. Elle demande :

- Puis-je en avoir encore?

Ce n'est qu'ensuite qu'elle se concentre sur les nombreuses questions de l'homme. Beaucoup d'un coup. Elle se demande s'il est judicieux de répondre à chacune d'elle. Doit-elle faire attention à ses propos, aux informations qu'elle va donner? Elle veut bien répondre, mais ça peut vite se retourner contre elle. Pourtant, la nervosité l'empêche de faire des raisonnements. C'est comme si c'était le vide, mais que résonnaient en écho les questions de l'homme.

Pour le repas. Sa première idée aurait été de demander " une spécialité du coin? " mais alors qu'elle s'apprête à le dire, elle se retient. Après deux jours en sa compagnie, il devinerait sans doute qu'elle cherche à savoir dans quel pays elle se trouve. Ça peut attendre une autre occasion.

- Je ne suis pas difficile. Faites-moi découvrir quelque chose.

Les questions maintenant.

- J'aime les couleurs pâles. Je déteste le rouge. J'ai pratiqué la gymnastique. Je fais du yoga. J'étais plutôt douée en patin...

Elle fixe son verre le temps d'énoncer ces premiers faits. Curieusement, parler de ce qu'elle aime est libérateur. Ça la plonge dans des souvenirs agréables. Penser aux couleurs, aux odeurs et aux activités qu'elle apprécie est bienfaiteur. Si quelqu'un ne faisait que décrire les choses qu'il déteste, sans doute ressentirait-il un sentiment de gouffre, de noirceur. Elle enchaîne avec un entrain qu'elle ne semblait pas avoir en arrivant, mais toujours avec une petite réserve. Mais clairement, elle parle avec plus d'aisance, moins de demandes, pour le moment.

- Je déteste porter ce qui est moulant. J'ai souvent eu un faible pour les romans historiques même si je les terminais rarement. (Elle se gratte la nuque par réflexe à cet aveu.) Je me suis souvent endormie devant les films. Je préférais surtout aller boire un café avec ma soeur. En fait, je crois j'adorais aller voir des pièces de théâtre.

A-t-elle soulevé tous les points? Elle se pince les lèvres, presque confuse d'avoir autant parlé. Est-ce le voyage, le long sommeil de la journée, le manque de socialisation? En voulant répondre à ses questions, elle n'a même pas tilté avoir mentionné sa petite soeur. Un détail qu'elle aurait sans doute mis de côté en étant plus vigilante.

Sa réserve revient lorsque l'homme glisse ses yeux le long de son corps aux formes qu'il apprécie. Des mots vides étant donné qu'il doit dire la même chose aux filles qu'il choisit. En s'ouvrant à lui, elle s'est emportée. Elle s'en rend compte maintenant. Elle n'aurait jamais dû parler de sa soeur. L'information s'est échappée sans qu'elle n'y fasse attention. Les questions de l'homme étaient relativement simplicités pour ne pas qu'elle pense à elle. Si cette erreur n'avait pas été la sienne, elle aurait attrapé ce verre à nouveau plein pour lui balancer le liquide au visage. Si l'homme avait de lui-même mentionné sa soeur, elle aurait sûrement disjoncter. Là, elle se sent surtout coupable. C'est sa faute. Pour éviter d'empirer cette situation, elle continue dans la voie de la discussion, faisant beaucoup d'effort pour rester concentrée :

- Japonais ça me convient.

L'homme souhaite la voir approcher. Après ça, elle aurait préféré garder sa place sur cette chaise. Mais il insiste en tapotant sa cuisse. Elle sait qu'il peut se montrer irrité, impatient et violent lorsqu'elle retarde l'inévitable. Mais la pression monte, parce qu'elle voudrait être en colère, mais cette colère est surtout tournée vers elle-même. Elle hoche d'abord la tête pour montrer qu'elle a compris. Mais son enthousiasme est vite retombé. Lentement, elle s'approche. Lèvres pincées, elle observe sa jambe, se demande si elle doit simplement s'y asseoir? Mais une voix dans sa tête lui dit qu'il pourrait facilement glisser ses doigts contre sa cuisse dénudée. Elle opte pour une autre position en venait s'installer à califourchon contre son bassin, prenant graduellement appui sur lui, ses mains sur ses épaules.

- Comme ça, ça va? répond-elle enfin.

Avec lui, elle est vite dépassée. Parfois, elle arrive à dire non, arrive à répliquer. D'autres fois, elle est prisonnière de ses appréhensions, de ses craintes, de ce qui pourrait arriver. Elle aurait réellement apprécié la présence de fenêtre pour avoir l'excuse de redresser la tête et d'observer l'horizon. Car présentement, les murs ne sont guère intéressants et ne lui permet aucune distraction. Il n'y a que lui et elle. Lorenzo devra-t-il s'absenter pour aller chercher la commande lorsqu'elle arrivera? Est-ce que quelqu'un d'autre se présentera? Elle essaie surtout de ne pas trop bouger, ses yeux rivés sur son visage. Elle est dérangée par la minceur des tissus qu'elle porte, qui laisse à la fois passer le vent et les sensations trop facilement.

Ainsi prêt de lui, elle ne possède pas la même aisance. Elle est parvenue à lui parler ouvertement parce que la distance aidait, parce qu'elle avait été séparée de sa personne pendant plusieurs heures. Là, elle se sent attirée dans un trou noir, ne voyant ni devant ni sur les côtés. Il veut connaître ses goûts, ses préférences ainsi que ses envies. Il précise : les fantasmes qui l'animent. Elle semble vouloir secouer la tête, les sourcils froncés.

- Je n'ai jamais vraiment eu ce genre de pensées avant.

Tree aurait opté pour le silence. Mais son " avant " vient de trahir l'ensemble de son aveu. Avant, elle n'avait pas de pensées pour les caresses, pour les baisers, pour les positions. Mais depuis ce matin, depuis cette première découverte, il est vrai qu'elle y pense, qu'elle se demande comment certaines douleurs auraient pu être éviter. Elle ne peut s'empêcher de comparer le bon et le mauvais. Elle a détesté être écrasée sur ce lit, la gorge pilonnée. Mais elle se mentirait à elle même si elle prétendait ne pas avoir apprécié les contractions de son corps une fois détendue. Elle avait sous-estimée l'expérience d'être assise sur lui, incapable de se défiler à son propre plaisir. Et cette réflexion traverse son esprit alors qu'elle est assise sur lui, mais complètement habillée. A-t-elle des envies? Doit-elle vraiment répondre? Peut-être qu'il réfléchira aux propos, fera comme ce matin et prendra soin d'atténuer la douleur. D'un autre côté... elle ne devrait pas parler de choses aussi intimes avec un homme comme lui. Elle a déjà voulu être caressée par sa copine, mais jamais cette dernière ne l'a enflammée au point qu'elle ne réfléchisse à davantage. L'homme vient d'embrasser la peau disponible de sa poitrine. Elle ressent encore la présence de ses lèvres. Elle se demande alors : aimerait-elle sentir ces lèvres ailleurs? Que peut-on qualifié de fantasme? Que veut-elle découvrir? Pour une fois qu'elle peut s'exprimer, elle est soudainement sans voix. Et pourtant, ses lèvres s’entrouvrent chaque fois qu'elle semble vouloir partager son constat.

- J'aimerais apprendre à savoir ce qui me donne envie.

Son manque d'expérience ne lui permet pas de savoir ce qui la charme et ce qui la révulse. Elle pensait être uniquement attirée par les femmes, parce que sa relation était merveilleuse. Alors comment l'homme a-t-il réussi à lui procurer autant de sensations par des caresses si précises? Un moment, elle baisse la tête, sans rien fixer de particulier. Elle fouille à l'intérieur de sa tête, cherche quelque chose de concret à mentionner à l'homme pour ne pas l'insulter alors qu'il prend le temps de demander. Et les tic-tac de la montre ne l'aident pas à prendre son temps.

La main à la montre cherche le poignet de l'homme. Et sans un mot, elle guide cette paume masculine à sa poitrine, voulant ressentir cette chaleur au travers du fin tissu. Un contact simple, qui pourtant répond à une question.

Elle aurait pu le dire par des mots. Mais visiblement c'est plus compliqué que prévu. C'est indescriptible. Elle ne s'arrête pas là. Elle glisse ses mains entre eux, passe ses doigts au bas de la robe. Elle se sent devenir rouge. Cette robe, elle la soulève, la faisant peu à peu remonter. Et finalement, elle la retire complètement, les bras levés. Elle n'est pas certaine de devoir laisser tomber le vêtement, donc le dépose entre eux. Il a simplement voulu savoir ce qu'elle voulait. Des sensations aussi bonnes que ce matin.

L'homme lui offre un baiser qui parvient à l'empêcher de respirer. C'est incroyable comme un si petit contact peut avoir une aussi grande influence. Un sens en moins. La cravate rouge s'enroule à sa tête pour bloquer sa vision. Elle ferme souvent les yeux sous la gêne, mais au moins elle a la possibilité de les ouvrir à sa guise. Dans ce cas, elle est restreinte. Elle essaie pourtant : un réflexe, mais elle n'y parvient pas. Le noir complet s'impose tandis qu'il se redresse. Assise, elle était plus à l'aise, car elle n'avait pas à craindre de ne savoir où elle se trouve. Debout, c'est complètement différent. Ses jambes sont incertaines. Elle le laisse donc guider ses mains vers sa chemise qu’elle touche du bout des doigts, comme si elle découvrait cette texture pour la première fois. Rapidement, ses doigts trouvent les boutons de la chemise. Elle aurait pu se contenter de ça, aurait pu continuer de découvrir le vêtement. Mais peu à peu, la chemise est ouverte, bouton après bouton. La fille semble se laisser entraîner à découvrir, ne sachant si elle peut refuser d’accéder à ses paroles.

La première fois qu’elle a réellement touché cette partie de son corps, volontairement, c’était sous la douche, au moment de le laver à son tour. À ce moment, elle ne s’attardait pas vraiment, et sa main était couverture du gant de bain. Là, c’est tout autre chose. Le bout de ses doigts entrent en contact direct avec sa peau sans que la texture de l’eau n’alterne la sensation. Les yeux ainsi bloqués, elle en oublierait presque qu’elle vient d’enlever sa robe. Elle comprend qu’elle touche le ventre, qu’elle remonte vers son torse. C’est timidement qu’elle contourne son pectoraux lorsqu’elle sent un bout de chair frôler son doigt. Ses paumes se faufilent sur ses épaules, directement sous le tissu de la chemise. Elle se rend compte qu’elle aime cette partie de son anatomie. Des épaules larges ; possiblement les plus solides qu’elle ait touché jusqu’à présent. Surtout quand elle passe ses pouces le long de ses clavicules. L’homme n’a pas spécifié combien de temps elle devait toucher, mais il ne demande pas non plus à ce qu’elle arrête, alors elle continue. Plongée dans le noir, c’est vrai qu’elle est surtout concentrée à ressentir sans savoir qu’elle pourrait être observée. Ses mains remontent donc le long de son cou, jusqu’à ce qu’elle touche une mâchoire encadrée de barbe proprement entretenue. C’est cette sensation qui la rend bizarre, qui confirme qu’elle touche bel et bien un homme. Sans savoir où ses doigts se dirigent, elle caresse involontairement sa lèvre inférieure de son pouce. À cet instant, elle se dit qu’elle doit arrêter de toucher. Alors ses mains s’éloignent de sa peau. Rompre ce contact est plus perturbant que prévu, car elle se retrouve perdue au milieu de nulle part, aveugle. Elle n’aurait pas dû s’asseoir sur ses cuisses, n’aurait pas dû retirer sa robe.

- Combien de temps je dois garder ça sur les yeux? souffle-t-elle entre deux pensées contradictoires.

Tree ne réalisait sûrement pas à ce moment précis qu’elle était complètement à la merci de l’homme qui comptait bien profiter de cette vulnérabilité. Elle ne réalisait pas à quel point elle était sexy comme cela, en simple culotte devant lui avec sa cravate nouée sur la tête. Si Lorenzo avait déjà eu des pensées saines, elle les aurait complètement perverties à cet instant. Ses mains contre son collet, il sentit rapidement l’air se glisser sur son torse alors que chacun des boutons de sa chemise sautait. Ses mains chaudes vinrent en contact avec sa peau où ses doigts fins en découvraient chaque partielle. Son ventre, son torse, ses épaules, son cou... Tree se laissait prendre au jeu et laissait ses mains caresser sa peau. À des points plus précis, Lorenzo sentit quelques frissons parcourir son échine. Surtout au niveau en sa clavicule qui s’avérait plus sensible qu’il n’aurait pensé. Pendant ce mouvement, sa chemise avait glissé le long de ses bras pour se retrouver au sol. « Aussi longtemps que j’en aurai envie... » fut sa seule réponse. 5 minutes? 10 minutes ? 30 ? Il ne savait pas combien de temps il aurait envie de garder le contrôle sur la jolie blonde.

Ce fut à son tour. Lorenzo s’était approché légèrement et sans qu’elle ne puisse s’y attendre, il laissa ses mains glisser sur son corps. Elle allait connaître le plaisir d’être touchée à l’aveugle. Ses hanches pour commencer puis une remontée vers sa taille avant de redescendre dans son dos pour s’attarder sur ses fesses en glissant sous la tanga en dentelle. L’homme approcha son visage et laissa son souffle chaud se mêler à celui de Tree sans toucher ses lèvres. Il voulait la laisser incertaine, la sentir complètement perdue. Finalement, il laissa ses lèvres dévier dans le cou de la jeune femme. Il l’embrassa à plusieurs reprises tout en se décalant vers sa clavicule, parfois ajoutant sa langue. Lorenzo continua sa descente jusqu’à atteindre l’un de ses seins. Contrairement à ce matin, il l’embrassa avec une certaine tendresse avant de s’arrêter et de s’éloigner légèrement. Pendant un moment, le mafieux la fixa, laissant monter la tension de l’inconnu. Il attendit près de deux minutes avant de déposer ses mains sur les épaules de la blonde pour pousser légèrement et l’inciter à se mettre à genoux devant lui. À nouveau, il attrapa ses poignets pour guider ses mains à sa ceinture. Il voulait qu’elle continue sa découverte.

Le mot qui la décrirait au moment où les mains de l'homme s'empare de son fessier et où il joue avec son souffle c'est : molle. Il descend ses lèvres, d'abord le cou, la clavicule, pour poursuivre à sa poitrine. Le fait de ne pas le voir change complètement la donne. Elle est obligée d'imaginer visuellement des sensations. La première fois, elle a bien mentionné qu'elle ne voulait pas seulement imaginer. Mais là, elle n'a pas le choix. En plus, elle ressent les choses. À se demander si elle ne recherche pas elle-même à être touchée, sinon pourquoi retirer son vêtement, pourquoi exécuter les demandes? À l'aveugle, elle prend moins conscience que tout ça c'est une erreur, privée d'une vision logique et révélatrice.

Deux longues minutes où elle respire difficilement, qu'elle n'ose pas bouger, qu'elle attend, se retenant de ne pas arracher le bandeau.

Les mains de l'homme reviennent sur ses épaules. Cherchant à comprendre ce qu'il veut, elle fronce les sourcils. Mais la réponse arrive vite quand il émet une pression sur ses muscles. Un vertige. Une soumission qui l'effraie. Ses genoux touchent le sol, ses mains sont guidées. Comme la chemise, elle imagine qu'elle doit ouvrir le vêtement. Elle déboutonne alors lentement le pantalon. Celui-ci, sans attache, est victime de la gravité, chute aussitôt des hanches.

Qu'est-ce qu'elle doit toucher maintenant? Ses mains sont moins exploratrices à ce niveau. Chaque fois qu'elle dirige son toucher vers un endroit spécifique, elle se désiste, change de trajectoire. Jusqu'à ce sa paume passe sur la bosse cachée sous le sous-vêtement. C'est comme si tout son corps devenait réactif. Elle fige, sa paume enveloppant cet organe qui parvient encore à la gêner. Qu'est-ce qu'il attend d'elle? Doit-elle lui retirer son vêtement? Doit-elle simplement toucher? Doit-elle arrêter parce qu'ils vont bientôt manger? Combien de temps avant de manger? Elle n'arrive pas à se raisonner. Comme si son corps était en accord avec le fait d'être ainsi traité, contrairement à son esprit qui peine à se faire comprendre et qui refuse qu'elle continue à être si stupide! Ses genoux sont déjà inconfortables. Elle tente de bouger les doigts, mais plutôt que de réussir à les retirer, elle se surprend à découvrir cette forme au travers du tissu presque curieuse et gourmande. Elle a le sentiment qu'on pourrait la gronder pour ça, comme si elle vérifiait un item dispendieux dans une boutique et qu'elle devait d'assurer de ne pas être remarquée.

- Je dois continuer ou m'arrêter? demande la fille, l'index effleurant l'élastique du vêtement.

Et sa voix est loin, signe que la tension est effectivement présente dans tout son corps, qu'elle n'a presque plus le contrôle de ses doigts. Et elle ne voit toujours rien, réellement privée d'un sens qui permet de garder le contact avec la réalité. Elle est privée d'une porte de secours.