Quand on a un papa aussi riche, on peut se dire que la vie est facile et que tout nous est du. Mais on est bien loin de la réalité des choses. La vie n'est qu'une façade pour les autres, personne ne sait réellement ce qu'il se passe entre les murs de la maison. Ça peut être un réel conflit d'intérêt, amoureux, ou simplement une mésentente. Un souvenir oublié qui a créé des tensions et que personne ne comprend. Mais le sentiment réside toujours dans le cœur, on se dit qu'on ne pourra jamais aimer cette personne détestable.

Emiliana est née d'une union entre un géant de la direction et une femme qui semblait ne pas réellement l'aime. Elle ne se plaint pas réellement de sa mère. Elle n'a pas le souvenir d'un amour maternel prononcé, de soirées câlins à lire des histoires. Elle n'était pas maltraitée pour autant mais bien délaissée. Papa travaillait trop et maman s'en plaignait. Parfois, elle se demande encore ce qui a poussé ce couple à garder l'enfant. Sa chambre était huit fois trop grande pour elle et toujours remplie de jouets. Mais ça ne comblait pas l'ennui ni le manque d'amour. Parfois, elle allait jouer avec les hommes qui rendaient visite à son papa. Dans le lot, il y en a bien un qui se détachait du reste. Un qui était gentil, qui s'occupait un peu d'elle. Des sourires, des bonbons dans les poches. Une petite tape sur le crâne en guise de bonjour. C'était toujours vers lui qu'elle allait, naturellement.

Lorsqu'elle eut cinq ans, ses parents ont déménagé en Australie, à Melbourne plus précisément. Du Mexique, Emiliana n'en garde pas de grands souvenirs. Parfois, elle se souvient d'une musique, d'une odeur qui la laisse entrevoir un flashback éparse, tel un rêve éveillé. L'Australie c'est un peu comme le Mexique, il y fait très chaud. Melbourne est une belle ville. Ça aurait pu être le vie de rêve si l'enfant n'était pas tombée subitement malade vers l'âge de sept ans. Le médecin, malgré toute ses tentatives, n'arrivait pas à soigner cette enfant, ne comprenant pas ce qu'elle avait. Chaque fois qu'il se penchait sur elle, Emiliana lisait dans ses yeux une lueur de culpabilité, de tristesse. Allait-elle mourir ? Vomissement, diarrhée, fièvre, l'enfant est restée ainsi durant plusieurs mois. Elle tenait le lit, ne mangeant que de la soupe que sa mère lui montait à chaque repas. Une soupe avec un drôle de goût. Quand elle en a parlé à sa mère, celle-ci a dit que c'était parce qu'elle était malade et que la nourriture perdait de sa saveur. Un soir, alors que l'enfant essayait de dormir en luttant contre sa nausée, elle a finit par se lever, cherchant sa mère ou son père, ou n'importe qui qui aurait pu l'aider, la dorloter. Des éclats de voix se faisaient entendre dans le salon, la porte entrouverte. Curieuse mais surtout se demandant si ses parents s'y trouvaient, l'enfant y jeta un œil discret. Le dernier souvenir qu'elle se rappelle de cette nuit là c'est son père en train de tuer sa mère. À partir de ce jour, elle n'a plus jamais été malade mais elle n'a plus jamais adressé la parole à son père.

Cet incident marquant forgea le caractère actuel de la jeune femme. Au départ, douce et gentille, elle est vite devenue insolente et rebelle. Allant mieux, retournant à l'école, elle s'est mise à maltraiter les autres enfants. Puis, elle est devenue une adolescente. À douze ans, elle fumait déjà et faisait le mur pour rejoindre des garçons toujours plus âgés qu'elle. Loin d'être une fille prude, ses tenues se raccourcirent, elle entreprit d'avoir sa première relation sexuelle à treize ans avec un garçon ayant dix ans de plus qu'elle. Elle a brisé des cœurs et des couples. Malgré tout, ses notes à l'école ne chutaient pas. À croire qu'elle avait le temps de travailler entre deux conneries. Passionnée de biologie et de l'étude du l'humain dans son ensemble, Emiliana a montré un réel intérêt à analyser les autres. C'est à ce moment là qu'elle est devenue une manipulatrice professionnelle. Elle savait comment faire tomber les autres, elle savait aussi faire pleurer les autres filles tout en se dédouanant de ses actes. C'est vers quinze ans qu'elle a imposé une relation amoureuse à son père. Le garçon était à peine plus âgé, l'emmenant chez elle à n'importe quelle heure. Il était loin d'être l'élève modèle, plutôt marginal, reclus de la société. Sûrement que la jeune fille prenait du plaisir à se pavaner sous le nez de son père avec ce loustique qui ne la méritait pas. Voleur, menteur, profiteur, voilà ce qu'il était. Il osa plus d'une fois prendre Lorenzo de haut, devant une Emiliana victorieuse. Peu importait les colères de son père, la provocation était toujours de mise. Au final, après avoir longtemps profité de la condition de la jeune fille, après trois ans de relation houleuse et chaotique, il fut surpris dans les bras d'une autre. Des cris, des larmes et même des coups sortirent de cette dispute. Puis, il a disparu de la surface de la terre.

Aujourd'hui, toujours provocatrice, Emiliana semble être une étudiante studieuse mais fêtarde. Elle parle toujours peu à son père et leurs échanges sont toujours très houleux. Cependant, elle vit malgré tout sur ses ressources à lui donc elle se doit de le respecter un minimum. L'amour ce n'est pas fini pour elle, elle continue de butiner à droite à gauche, de briser des vies, des couples, ça lui plaît. Elle n'arrêtera sûrement jamais.