« Rends-moi mes baskets avant que je te démonte ! » April, courant après l’un de ses frères, le deuxième. Ils ont à peine dix mois d’écart, ils sont toujours en train de se chicaner, mais pourtant, ils sont aussi comme cul et chemise. L’aîné, c’est celui qui sort de nulle part et qui bloque soudainement son petit frère dans sa course, permettant à la plus âgé des sœurs de sauter sur son frère pour récupérer son bien. Les deux se retrouvent au sol en train de se chamailler, la petite dernière, qui a trois ans de moins qu’April, et celle qui crie au père que les deux sont encore en train de se battre. L’aîné se retrouve alors obligé d’intervenir, de toute façon, le père de la fratrie est dans un même temps en train de lui crier de le faire. Il y a très peu d’écarts entre la fratrie, l’aîné n’a que deux ans quand vient son premier frère, puis dix mois après, débarque April. Et ses aux six ans de l’aîné, que naît la petite dernière. Ils sont très proche et complice, ils ont chacun leurs personnalités, ce qui créait des discordes, mais bien vite, ils se réconcilient. Le père leur donne beaucoup d’amour et une bonne éducation et il s’est beaucoup appuyé sur l’aîné pour l’aider. A la mort de sa femme, il aurait pu se laisser aller, mais pas avec ses quatre enfants et la promesse fait à sa femme. Chacun eut son moment avec la mère, la fille aînée se rappellera toujours des mots de sa mère, mais surtout ceux qu’elle lui disait toujours « Sois toi-même, n’écoute pas le jugement des autres. Tu es belle, talentueuse et forte, ne laisse personne te dire le contraire » April n’avait que huit ans quand elle a perdu sa mère, la famille en a beaucoup souffert, mais ils se sont soutenus, ça n’a fait que renforcer leurs liens. April était un petit garçon manqué, la perte de sa mère ne l’a pas aidé à trouver sa féminité, encore moins avec la proximité qu’elle a avec ses frères.

« Dana, il me rend dingue », une confidence qu’April faisait à son amie avec qui elle a grandi. April avait rencontré un homme il y a quelques semaines, lors de sa troisième année de droit. La jeune femme avait eu une bonne scolarité tout le long, ce n’était pas forcement le genre à avoir toujours la tête dans un bouquin, enfin de cours, April adore lire. Mais elle a toujours eu une très bonne mémoire, une mémoire d’éléphant, elle entend les choses une ou deux fois et elle les retient. Donc c’était une très bonne élève, avec quelques difficultés dans les matières scientifiques quand il fallait passer à l’application. Après le lycée, elle s’était tournée vers les études de droit, désirant devenir notaire ou avocat, ou plutôt, suivant le souhait de son paternel. Il faisait de son mieux pour élever aux mieux la fratrie seul, soutenu par l’aîné et bien heureusement, entre les deux autres qui font toujours les 400 coups et la petite dernière princesse, il faut un coup de main, mais l’aîné devait tout de même garder sa place et vivre sa vie. April, elle ne voulait pas faire de soucis à son père, même si elle aurait plutôt préféré devenir championne de boxe ou aller dans une école d’art, mais cette dernière option été trop couteuse et pas assez sûr du point de vue du paternel. Bref, April, vingt ans, était en train de tomber amoureuse pour la première fois. Elle le nit, il l’énerve, il est toujours en train de la chercher, un coup ils flirtent, un coup ils s’insultent puis ils pouvaient aussi se retrouver toute une nuit pour seulement parler, de tout et de rien. April se maquillait tous les jours, ça, c’est un signe. En parlant de ça, April a découvert à féminité à la fin du lycée, se rendant bien compte qu’elle était bien trop masculine et qu’elle devait faire un effort. Etonnamment, se fut la petite sœur qui aida le plus April à devenir plus femme. Et depuis, April s’habillait plus femme, elle met même quelques fois des robes et du maquillage léger. Ils finirent par se mettre ensemble, ils n’eurent pas besoin d’officialiser, cela se fit naturellement. Mais leur relation en fut pas de doux repos, c’était passionnelle, électrique et aussi très complice.

« Non, non, non, non », April n’avait que se mot en bouche, assise sur le canapé, les genoux pliés et ramener à son visage. Un coup de téléphone et April n’était plus que l’ombre d’elle-même. Sa colocataire, son amie depuis l’université, finissait la conversation téléphonique avant de venir la prendre dans ses bras. Il était parti pour une mission humanitaire depuis deux mois, il devait rentrer la semaine prochaine, ils auraient fêté leurs quatre ans. Mais il y a eu un kidnapping, des mises à mort et finalement, aucun survivant. C’est son beau-père qui lui annonça, dévasté. Un vide se fit en elle, April avait un trou au cœur comme un tir qu’elle aurait reçu. Sa coloc avait dû prévenir Dana, elle était là aussi, mais April ne serait pas dire depuis combien de temps. Les secondes, les minutes, les heures, le temps s’est arrêté, plus rien n’a d’importance, elle venait de perdre l’homme de sa vie.

« Le premier mercredi du mois prochain, c’est mon premier vernissage avec autant de monde de prévu, je ne peux pas oublier », depuis cinq ans, April s’est lancé, poussé par ses amis et sa famille, à montrer et vendre ses toiles. Et le mois prochain, elle allait faire un vernissage très important qui pourrait peut-être la faire reconnaitre dans le monde de l’art, de la peinture. Elle pourrait peut-être enfin lâcher son travaille d’illustratrice de livre pour enfant dont elle n’est pas très fan. Pas qu’April n’aime pas les enfants, mais les dessins « enfantin », elle commençait à ne plus vraiment en pouvoir. Surtout qu’elle est dans la peinture très réaliste, les paysages, les portraits, elle est de plus en plus extravertie dans le domaine, faisant aussi depuis peu des nues. Au contraire, elle n’est pas pressée de quitter son travail de serveuse, elle l’apprécie et aime l’ambiance de ce pub, mais son idéal est de finir par vivre seulement de sa passion. April boxe toujours, elle a d’ailleurs bien repris après sa disparition de son premier et seul amour. Trois ans déjà, pourtant elle pense toujours autant à lui, comme si c’était hier qu’il l’a serré dans ses bras ou qu’elle entendait sa voix. Elle ne se sent pas prête à tourner la page, à retomber amoureuse, donc elle papillonne. Dernièrement, il y a eu ce qu’on peut appeler un dérapage incontrôlé ; April a couché avec l’un de ses meilleurs amis, ils sont une bande de cinq avec Dana et Joy, ainsi que deux hommes, ils vivent dans le même immeuble depuis des années. Il n’y avait jamais eu plus que du flirt qui était vu comme de la taquinerie, quand il lui disait qu’il l’épouserait un jour et qu’elle lui répondait bientôt, que c’est l’homme de ses rêves. C’était de l’humour, c’était léger, pourtant, après un vendredi bien arrosé, April ne rentra pas dans son appartement avec Joy, elle passa la nuit avec lui. Et pour la première fois, elle ne pensait plus à son homme disparu. Peut-être qu’elle l’apprécie plus qu’elle ne le pensait, ou peut-être que c’est parce qu’il la connait ? Tant de questions qu’elle garde pour elle, n’ayant encore rien dit aux filles et se demandant si elle devait en parler, et si ça créer des conflits dans la bande ou des malaises ? Ce n’est qu’un coup d’un soir.